Only Lovers left alive – Jim Jarmusch : la coolitude faite homme

Jim Jarmusch s’attaque au mythe du vampire dans un film au titre tragico-romantique Only Lovers left alive. Rien d’étonnant pour le cinéma du réalisateur américain, qui s’intéresse aux out-siders, aux marginaux évoluant dans un monde étrange et décalé. Ici ils seront le moyen de transmission d’une réflexion sur le monde, l’art et l’amour qui malheureusement se noiera dans un amas de références culturelles, transformant ainsi le film de Jarmusch en ensemble pompeux et prétentieux.

Le cinéma de Jim Jarmusch explore les thèmes les plus nobles, l’amour, la mort, l’art toujours de son point de vue romantique et mélancolique. Il jouit alors d’un crédit qui précède la fabrication de ses films, crédit qui est loin d’être injustifié aux vues de son dernier travail Only lovers left alive. Jarmusch a en effet un sens du style hyper développé, dans ses dialogues d’abord qui accrochent l’oreille et deviennent culte à la seconde même où ils sont prononcés ( feel free to piss in the garden, that is certainly visual…), dans sa mise en scène habitée de plongées tournoyantes, de ralentis appuyés ou encore de plans picturaux, œuvres d’art instantanée. Dans sa bande son aussi, hypnotisante, partie intégrante du récit, enfin dans ses personnages, iconiques, ici deux vampires romantiques liés à jamais, deux silhouettes fantomatiques déambulant dans les rues si différentes de Détroit et de Tanger, mais tout aussi belles sous l’œil de Jarmusch.

Là où la magie opère beaucoup moins c’est dans le propos artistico-philosophique développé par le cinéaste. Adam (sa femme se prénomme Eve…) est un vampire mélancolique qui s’apitoie sur l’état du monde et l’incapacité des humains à créer du beau et du positif. L’idée c’est que tout était mieux avant, le prouvent les innombrables références, en forme de clin d’œil, à des œuvres littéraires, des auteurs, des compositions musicales, musiciens, mathématiciens, philosophes et autres grands penseurs. Le personnage de John Hurt est d’ailleurs Christopher Marlowe (Auteur de Didon) en personne qui se révèle être aussi secrètement à l’origine des plus belles œuvres de William Shakespeare. Si les premières allusions font sourire les suivantes lassent lorsqu’on se rend compte qu’elles représentent la majeure partie des dialogues, destinés alors directement à une seule partie du publique qui pourra les comprendre et donc en rire.

C’est bien là  le gros problème du film de Jim Jarmusch qui semble donner plus d’importance à une posture intellectuelle qu’au propos qu’il développe. Le résultat est alors plus une démonstration du savoir d’un réalisateur, que l’exploration de thèmes comme l’état de la société actuelle, les relations amoureuses et la reconnaissance artistique, qui sont ici ironiquement développés de façon simpliste et stéréotypée. A part nous la jeter à la figure Jarmusch ne fait pas grand usage de l’immense culture dont il est le détenteur et se perd dans des longueurs inutiles ponctuées de fulgurances qui heureusement pour lui, rattrapent l’ensemble.

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